Influences
Si on le compare
au déferlement d'action du Volume 1, KILL BILL Volume 2 pourrait
presque être qualifié de film psychologique.
Les deux volets n'en forment pas moins un tout,
que David Carradine définit comme "une histoire d'amour
à la manière kung-fu, western spaghetti et film de samouraïs".
Dans une interview récente, l'acteur ajoutait : "Le Volume
2 contient plus d'éléments « tarantinesques »
: des personnages sérieusement barrés, des surprises et
des touches comiques."
"Le film,
vu dans sa totalité, possède une dimension épique
digne de David Lean", commente David Carradine. "C'est toujours
du Tarantino, mais à une autre échelle."
LES ARTS MARTIAUX :
Né de l'imagination fébrile d'un incollable cinéphile,
KILL BILL porte l'empreinte des films d'arts martiaux asiatiques où
la relation maître-disciple est d'une importance primordiale.
Dans KILL BILL, ces maîtres sont au nombre de deux, et ils confèrent
aux deux Volumes des tonalités contrastées.
Le Volume 1 était placé sous le signe du code du bushido
, personnifié par le samouraï Hattori Hanzo, qu'interprétait
Sonny Chiba.
Le Volume 2 est dominé par les arts martiaux chinois, personnifiés
par le légendaire Gordon Liu.
Au départ, Gordon Liu devait seulement jouer Johnny Mo, chef
des gardes du corps d'Oren dans KILL BILL Volume 1.
Tarantino s'était adjugé le rôle de l'instructeur
en arts martiaux de la Mariée, en hommage à une figure
récurrente des films hongkongais des années 70 : le "moine
aux sourcils blancs" Pei Mei. Il commença par s'entraîner
avec les autres comédiens mais comprit qu'il n'aurait jamais
le temps d'assurer simultanément la préparation du film
et un entraînement physique quotidien. Il se tourna alors vers
Gordon Liu que tout prédisposait à tenir le rôle
de cet impitoyable professeur d'arts martiaux. Bien qu'il incarne le
plus souvent de purs héros bien différents du sombre et
inquiétant Pei Mei, Gordon Liu accepta la proposition : "Quentin
ne s'est pas laissé influencer par mon image. Il a tablé
sur ma connaissance des arts martiaux et sur ma familiarité avec
ce genre de personnage typiquement Chinois."
Tout en mettant davantage l'accent sur les rapports de personnages,
le Volume 2 continue d'explorer, rapprocher et marier divers genres
cinématographiques populaires favoris de Tarantino.
Quentin Tarantino :
"Je suis en terrain familier lorsque je tourne une scène
qui paraît sortir d'un film de terreur italien ou d'un kung-fu.
Je sais comment cela se fabrique. C'est pour cela que mes films fonctionnent
bien à travers le monde. Je ne me considère pas exclusivement
comme un réalisateur américain. Des gens de tous les pays
peuvent retrouver dans mon cinéma des choses qu'ils comprennent
et qu'ils apprécient."
La sélection de l'équipe reflète ce savant éclectisme.
Le directeur de la photographie Robert Richardson fut précisément
choisi pour sa facilité à obtenir des looks très
contrastés et à passer sans transition de l'un à
l'autre à l'intérieur d'une même scène (notamment
dans JFK et TUEURS-NÉS d'Oliver Stone). Le style visuel et la
rythmique de KILL BILL devant évoluer d'épisode en épisode
en fonction des genres référencés, Richardson était
un choix idéal pour mettre en uvre ce concept.
Deux genres chers au cinéaste ont eu un impact particulier sur
KILL BILL Volume 2.
Quentin Tarantino :
"Si ma vie était un miroir à deux faces, l'une renverrait
l'image des films d'arts martiaux produits par les Frères Shaw
dans les années 70, et l'autre, les westerns italiens.
Les Westerns Italiens
En réalité, ces deux genres se sont mutuellement influencés,
utilisant souvent des intrigues, images et plans similaires
et
parfois les mêmes musiques! Les films des Frères Shaw ont
beaucoup emprunté au western italien. La parenté est profonde."
Ce double héritage est lisible, et clairement délimité,
dans le Volume 2 : les séquences au présent, qui se déroulent
dans le sud-ouest des États-Unis, adhèrent au style du
western italien ; les retours en arrière, situés principalement
en Chine et consacrés à l'apprentissage de Mariée,
adoptent la structure d'un film de kung-fu classique où le héros
se prépare minutieusement à la vengeance finale.
La veine américano-mexicaine prédominante de KILL BILL
Volume 2 imprègne la bande originale, où l'on retrouve
le "Can't Hardly Stand" du grand chanteur de rockabilly Charlie
Feathers, des extraits de la musique d'Ennio Morricone pour LE BON,
LA BRUTE ET LE TRUAND, aussi bien que "Urami Bushi" ("Chant
d'amour du guerrier"), interprété originellement
par Meiko Kajhi dans le film de samouraïs LADY SNOWBLOOD 2 : LOVE
SONG OF VENGEANCE (1974).

Les Coulisses
Made In China
Lawrence Bender (Producteur) :
"Aller en Chine a été la plus heureuse de toutes
nos décisions. Une fois sur place, Quentin a tenu à bénéficier
pleinement des forces vives du pays. Il ne voulait pas faire venir une
équipe 100% américaine qui aurait dicté sa loi.
Résultat : nos décorateurs japonais et chinois ont accompli
ensemble des prodiges que nul ne pouvait escompter."
Tarantino, Bender et les principaux interprètes de KILL BILL
débarquèrent en Chine en mai 2002 pour continuer l'entraînement
et débuter les répétitions. À la mi-juin,
le producteur délégué E. Bennett Walsh, les producteurs
associés Dede Nickerson et Koko Maeda et le chef opérateur
Robert Richardson avaient réuni une équipe technique multinationale
intégrant plusieurs escouades de traducteurs et avaient entamé
le travail aux Studios de Pékin.
KILL BILL a employé pas moins de trois chefs décorateurs
(un Chinois, un Japonais, un Américain), deux chefs costumiers
et chefs accessoiristes chinois et américains, une équipe
d'assistants chinois et américains, la coordination de l'ensemble
des acteurs et techniciens étant assurée par le premier
assistant américain Bill Clark (PULP FICTION, JACKIE BROWN) et
son homologue chinois, Zhang Jin Zhan.
Lawrence Bender :
"Les méthodes de travail américaines et chinoises
présentent des différences fondamentales. L'américaine
repose sur une spécialisation poussée, chaque poste technique
étant tenu par une ou deux personnes qui ne font rien d'autre.
Résultat : un plateau ordonné et une ambiance très
concentrée. En Chine, en revanche, la moindre opération
mobilise vingt types qui vont se démener, faire un boucan d'enfer
et obtenir très vite des résultats." Un exemple éloquent
de cette efficacité : lors de sa première journée
de tournage en Chine, l'équipe réalisa vingt-deux plans,
un record impensable pour une production hollywoodienne classique.
Le séjour aux Studios de Pékin fut interrompu durant
une semaine pour le tournage des séquences d'entraînement
au kung-fu Shaolin réunissant Uma Thurman, Daryl Hannah et Gordon
Liu. Le décor de cet épisode est le Temple Gao, situé
à proximité de la ville de Zanghwei et construit au XVIIe
siècle. On y accède par un immense escalier de 240 mètres
dont la montée donnait à l'équipe et aux comédiens
un petit avant-goût des "plaisirs" à venir.Maître
Yuen Woo-Ping a appris son métier auprès de son père,
feu Simon Yuen Hsiao-tien, acteur de cinéma et illustre figure
de l'opéra de Pékin. Devenu réalisateur, Woo-Ping
lui attribua le rôle-titre de DRUNKEN MASTER (1978), film dont
Jackie Chan tenait la vedette. Maître Yuen souligne que les techniques
qu'il enseigne sont d'essence théâtrale plutôt qu'orientées
vers le combat.
Yuen Woo-Ping :
"Ce sont des acrobaties et des arts martiaux conçus pour
la scène et typiques de la Chine du Nord. C'est totalement différent
des combats de kung-fu et même du wushu, discipline inventée
en Chine et que pratique Jet Li. Ce qu'on vous apprend à l'opéra
de Pékin ressemble aux arts martiaux, mais c'est en réalité
complètement différent car pensé pour la scène
ou la caméra. Bref, pour le spectacle."
Et Daryl Hannah de préciser : "J'ai été entraînée
pour ce film à donner des coups très rudes
arrêtés
à quelques centimètres du visage de l'adversaire. J'ignore
quel en serait l'effet en cas de contact!"
Le grand public a découvert Maître Yuen grâce à
MATRIX et TIGRE ET DRAGON, mais Tarantino en était fan bien avant
sa percée hollywoodienne. C'est d'ailleurs grâce à
lui que le film de Yuen, IRON MONKEY, a été distribué
par Miramax aux États-Unis en 2000, sous la bannière "Quentin
Tarantino Présente".
Quentin Tarantino :
"C'est avec sa première réalisation, SNAKE IN THE
EAGLE'S SHADOW, interprétée par Jackie Chan, que j'ai
découvert Maître Yuen. J'ai commencé à prendre
conscience de son style de kung-fu, de ses chorégraphies, vers
1993, et j'ai pu dès lors distinguer son apport de celui de ses
collègues.
J'ai trouvé que ses chorégraphies, d'un professionnalisme
impeccable et d'une créativité débridée,
étaient les plus imaginatives de tous les temps. Parmi tous les
réalisateurs et chorégraphes de films d'action, c'est
lui que j'admire le plus. Dans ce film, j'ai défini la structure
des scènes d'action.
Yuen m'a dit que je n'avais pas besoin de connaître à
fond le kung-fu : il me suffisait de bien comprendre les films de kung-fu,
et lui se chargerait du reste. Sa présence m'a donné confiance
et m'a permis de concrétiser toutes les idées qui me passaient
par la tête."
Légende vivante du cinéma de Hongkong, Gordon Liu a étudié
les arts martiaux chinois dès l'âge de sept ans. C'est
un Maître aussi accompli que Yuen. Comment se déroula la
rencontre de ces deux grands artistes? On ne peut plus cordialement,
assure Gordon Liu.
Gordon Liu :
"Nos formations diffèrent, mais nous avons l'un pour l'autre
un grand respect. Maître Yuen a appris un style d'arts martiaux
propre au nord de la Chine, alors que le mien est typique du sud. Cela
n'a pas engendré la moindre tension sur le plateau car nous avons
tous deux une longue expérience du cinéma et avons travaillé
avec des partenaires et des chorégraphes très divers.
J'ai eu grand plaisir à collaborer avec Maître Yuen."
Les deux approches n'en présentent pas moins des différences
fondamentales. Gordon Liu a tourné la plupart de ses films à
Hongkong sous la direction de son "parrain" Liu Jian-liang,
attaché à une représentation authentique des arts
martiaux régionaux. À l'inverse, Yuen est connu à
travers le monde pour ses chorégraphies aussi gracieuses et aériennes
que fantaisistes.
Gordon Liu :
"Maître Yuen a uvré en artiste sur TIGRE ET
DRAGON, mais ses magnifiques combats étaient tout sauf réalistes.
Je savais que Quentin aspirait à tout autre chose, qu'il voulait
de vrais affrontements. Et je devinais que le mariage de nos deux approches
aboutirait à quelque chose de radicalement nouveau.
"La plupart des acteurs, même ceux de Hongkong, se bornent
à apprendre mécaniquement les mouvements nécessaires
à une scène d'action. Ce qui revient à apprendre
un texte phonétiquement, sans connaître la langue. Uma
a travaillé comme cela sur le film. Difficile, dans ces conditions,
de donner l'impression qu'on comprend réellement ce qu'on est
en train de faire. Quentin et Maître Yuen attendaient d'elle les
meilleurs résultats, et c'est à moi qu'il incomba de rendre
nos affrontements crédibles, de mettre Uma pleinement en valeur
tout en garantissant sa sécurité.
"Les arts martiaux chinois sont particulièrement difficiles
pour les débutants et pour les personnes de grande taille. Ce
n'est pas un hasard si la plupart des superstars du film d'action
Bruce Lee, Jackie Chan, Jet Li sont de taille modeste. Plus vous
êtes petit, plus votre centre de gravité est bas, plus
c'est facile. Uma partait donc avec un double handicap, mais cela ne
l'a pas découragée. Son ardeur et sa persévérance
m'ont profondément impressionné. Elle ne s'est jamais
contentée d'une prise approximative, elle a fait et refait les
scènes jusqu'à atteindre le niveau d'excellence qu'elle
s'était fixé."
Après avoir fourni dans son scénario une description très
précise des scènes d'action, Tarantino continua à
les peaufiner une année entière au fil de la préparation,
de l'entraînement et des répétitions. À Pékin,
entouré de traducteurs japonais, mandarins et cantonais, Tarantino
décrivit et/ou interpréta chaque plan sous le regard de
l'équipe technique, des acteurs, de Maître Yuen et ses
voltigeurs. Tout le monde était donc fin prêt à
l'arrivée au Temple Gao.
Arts Martiaux
Maître Yuen Woo-Ping a appris son métier auprès
de son père, feu Simon Yuen Hsiao-tien, acteur de cinéma
et illustre figure de l'opéra de Pékin. Devenu réalisateur,
Woo-Ping lui attribua le rôle-titre de DRUNKEN MASTER (1978),
film dont Jackie Chan tenait la vedette. Maître Yuen souligne
que les techniques qu'il enseigne sont d'essence théâtrale
plutôt qu'orientées vers le combat.
Yuen Woo-Ping :
"Ce sont des acrobaties et des arts martiaux conçus pour
la scène et typiques de la Chine du Nord. C'est totalement différent
des combats de kung-fu et même du wushu, discipline inventée
en Chine et que pratique Jet Li. Ce qu'on vous apprend à l'opéra
de Pékin ressemble aux arts martiaux, mais c'est en réalité
complètement différent car pensé pour la scène
ou la caméra. Bref, pour le spectacle."
Et Daryl Hannah de préciser : "J'ai été entraînée
pour ce film à donner des coups très rudes
arrêtés
à quelques centimètres du visage de l'adversaire. J'ignore
quel en serait l'effet en cas de contact!"
Le grand public a découvert Maître Yuen grâce à
MATRIX et TIGRE ET DRAGON, mais Tarantino en était fan bien avant
sa percée hollywoodienne. C'est d'ailleurs grâce à
lui que le film de Yuen, IRON MONKEY, a été distribué
par Miramax aux États-Unis en 2000, sous la bannière "Quentin
Tarantino Présente".
Quentin Tarantino :
"C'est avec sa première réalisation, SNAKE IN THE
EAGLE'S SHADOW, interprétée par Jackie Chan, que j'ai
découvert Maître Yuen. J'ai commencé à prendre
conscience de son style de kung-fu, de ses chorégraphies, vers
1993, et j'ai pu dès lors distinguer son apport de celui de ses
collègues.
J'ai trouvé que ses chorégraphies, d'un professionnalisme
impeccable et d'une créativité débridée,
étaient les plus imaginatives de tous les temps. Parmi tous les
réalisateurs et chorégraphes de films d'action, c'est
lui que j'admire le plus. Dans ce film, j'ai défini la structure
des scènes d'action.
Yuen m'a dit que je n'avais pas besoin de connaître à
fond le kung-fu : il me suffisait de bien comprendre les films de kung-fu,
et lui se chargerait du reste. Sa présence m'a donné confiance
et m'a permis de concrétiser toutes les idées qui me passaient
par la tête."
Légende vivante du cinéma de Hongkong, Gordon Liu a étudié
les arts martiaux chinois dès l'âge de sept ans. C'est
un Maître aussi accompli que Yuen. Comment se déroula la
rencontre de ces deux grands artistes? On ne peut plus cordialement,
assure Gordon Liu.
Gordon Liu :
"Nos formations diffèrent, mais nous avons l'un pour l'autre
un grand respect. Maître Yuen a appris un style d'arts martiaux
propre au nord de la Chine, alors que le mien est typique du sud. Cela
n'a pas engendré la moindre tension sur le plateau car nous avons
tous deux une longue expérience du cinéma et avons travaillé
avec des partenaires et des chorégraphes très divers.
J'ai eu grand plaisir à collaborer avec Maître Yuen."
Les deux approches n'en présentent pas moins des différences
fondamentales. Gordon Liu a tourné la plupart de ses films à
Hongkong sous la direction de son "parrain" Liu Jian-liang,
attaché à une représentation authentique des arts
martiaux régionaux. À l'inverse, Yuen est connu à
travers le monde pour ses chorégraphies aussi gracieuses et aériennes
que fantaisistes.
Gordon Liu :
"Maître Yuen a uvré en artiste sur TIGRE ET
DRAGON, mais ses magnifiques combats étaient tout sauf réalistes.
Je savais que Quentin aspirait à tout autre chose, qu'il voulait
de vrais affrontements. Et je devinais que le mariage de nos deux approches
aboutirait à quelque chose de radicalement nouveau.
"La plupart des acteurs, même ceux de Hongkong, se bornent
à apprendre mécaniquement les mouvements nécessaires
à une scène d'action. Ce qui revient à apprendre
un texte phonétiquement, sans connaître la langue. Uma
a travaillé comme cela sur le film. Difficile, dans ces conditions,
de donner l'impression qu'on comprend réellement ce qu'on est
en train de faire. Quentin et Maître Yuen attendaient d'elle les
meilleurs résultats, et c'est à moi qu'il incomba de rendre
nos affrontements crédibles, de mettre Uma pleinement en valeur
tout en garantissant sa sécurité.
"Les arts martiaux chinois sont particulièrement difficiles
pour les débutants et pour les personnes de grande taille. Ce
n'est pas un hasard si la plupart des superstars du film d'action
Bruce Lee, Jackie Chan, Jet Li sont de taille modeste. Plus vous
êtes petit, plus votre centre de gravité est bas, plus
c'est facile. Uma partait donc avec un double handicap, mais cela ne
l'a pas découragée. Son ardeur et sa persévérance
m'ont profondément impressionné. Elle ne s'est jamais
contentée d'une prise approximative, elle a fait et refait les
scènes jusqu'à atteindre le niveau d'excellence qu'elle
s'était fixé."
Les combats
Uma Thurman :
"Au terme de mon entraînement, j'avais le sentiment d'avoir
acquis certaines aptitudes au combat. Durant la dernière semaine,
j'ai travaillé la chorégraphie à un rythme quotidien,
afin d'assimiler les centaines de mouvements et combinaisons de cette
scène. Mais une fois sur le plateau, Quentin a zappé toute
cette chorégraphie, m'obligeant à assimiler "à
chaud" cinq, dix, quinze points précis par plan, tandis
que l'équipe caméra attendait patiemment que je sois prête!
J'ai soudain réalisé que ce que Woo-Ping m'avait inculqué
de plus précieux était d'apprendre
à apprendre.
Les acteurs découvrirent cependant qu'aucune mise en forme ne
vous prépare totalement à la réalité d'un
combat.
Yuen Woo-Ping :
"Chaque mouvement est réglé en fonction de la caméra.
Pour truquer un coup, on choisit, classiquement, un angle qui masque
le point d'impact. Mais, parfois, l'objet de la scène est de
mettre en évidence la rudesse du coup porté. Un contact
direct s'impose alors, et l'acteur mettra tout son talent à "vendre"
l'effet, en feignant d'accuser un coup d'une grande violence."
Le tournage en Chine fut pour Tarantino une occasion unique de "communier"
avec l'un de ses grands maîtres.
Quentin Tarantino :
"Les deux sociétés de production pour lesquelles
j'ai une affection particulière sont la New World de Roger Corman
dans les années 70 et la Sir Run Run Shaw des Frères Shaw.
Et, pour moi, l'as des réalisateurs de cette dernière
fut Chang Cheh. Il occupe au sein de la vieille école du film
de kung-fu la place de John Ford dans celle du western. C'est lui qui
signa en 1967 le premier vrai film d'arts martiaux : ONE-ARMED SWORDSMAN,
avec Jimmy Wang Yu. Cet authentique pionnier est mort en 2002 durant
les prises de vues de KILL BILL et j'ai parfois senti son esprit planer
sur nous."
Le fantôme de Chang Cheh intervint même dans la résolution
d'un petit problème technique
Quentin Tarantino :
"Pour simuler un jet de sang, on utilise aujourd'hui des dispositifs
relativement sophistiqués : tubes pressurisés, amorces,
etc. Moi, j'avais envie d'oublier que nous étions sur un film
à gros budget et je voulais me retrouver dans l'état d'esprit
d'un gamin de treize ans qui tourne en amateur dans le jardin de ses
parents. C'est alors que Yuen m'a dit : "Sais-tu comme on procédait
jadis? On donnait un préservatif rempli de sang à l'acteur
censé recevoir un coup de sabre, et lors de l'impact, celui-ci
pressait la capote et en faisait jaillir le liquide. Le résultat
était spectaculaire. On le doit à Chang Cheh." On
a essayé, et c'était réellement excellent. Je n'aurais
pas réussi à obtenir la moitié des effets recherchés
sans cette astuce."