Les Chevalliers du ciel
Réalisateur : Gérard Pirès

Genre : Action

Date : 09 Novembre 2005

Durée : 1 h 42

Origine : Français

Distribution : Pathé Distribution

D'après l'oeuvre de : Albert Uderzo / Jean-Michel Charlier

 

Résumé | Note production | Acteurs | Scénario | Producteur | Site Officiel | Récompenses | Lieux | Budget

Acteurs :

Benoît Magimel : Capitaine Antoine 'Walk'n' Marghelli
Clovis Cornillac : Capitaine Sébastien 'Fahrenheit' Vallois
Géraldine Pailhas : Maëlle Coste
Alice Taglioni : Capitaine Estelle 'Pitbull' Kass
Philippe Torreton : Bertrand, chef des Services Secrets
Jean-Baptiste Puech : 'Ipod'
Christophe Reymond : 'Stan'
Fiona Curzon : Mme Redgrave
Jean-Michel Tinivelli : Colonel Farje
Frédéric van den Driessche : Général Hardouin
Eric Poulain : Capitaine Kleber
Pierre Poirot : De Sèze
Peter Hudson : Général Buchanan
Mathieu Delarive : Wanai
Simon Buret : Jackpot
Vincent Cappello : Jeff
Rey Reyes : Stardust
Laurent Jumeaucourt : Lt. Boutier
Philippe Hérisson : Colonel Esbly
Yannick Laurent : Grizzly
Olivier Rabourdin : Général Commission
Sidney Wernicke : Lavigne
Jean-Yves Chilot : Houdon
Axel Kiener : L'Ankou
Omar Berdouni : Aziz Al Zawhari
Alexandre de Seze : Bunker
Jean-Raoul Lacote : un pilote de combat
Frédéric Cherboeuf : Tala
Cédric Chevalme : un bandit

Directeur Photo :

Pascal Lebègue
Eric Magnan
Eric Dumage

Musique : Chris Corner

Décors : Stéphane Cressend

Chef décoration : Jean-Pierre Fouillet

Costumes : Françoise Bourrec
Chattoune

Montage : Véronique Lange

Effets Spéciaux : Laurent Brett : designer titre

Casting :

Nathalie Chéron
Michael Laguens

Dialoguiste :

Gilles Malençon
Gérard Pirès

Son :

Marc Doisne : ingénieur adr
Jean-Paul Hurier
Ken Yasumoto : supervision montage sonore
Lucien Balibar
Selim Azzazi

Effets visuels : Eve Ramboz : superviseuse

Scénario : Gilles Malençon

Producteur :
Laurent Brochant
Nicolas Altmayer
Eric Altmayer

Production :

Outsider Productions
Mandarin Films

Producteur associé : Christopher Granier-Deferre

Assistant réalisation :

Simon Rooke : premier assistant (G.-B.)
Bonnie Pirès : assistant réalisateur stagiaire
Fanny Aubrespin : premier assistant
Marie Rolindes : assistant réalisateur stagiaire
Yann Cuinet : second assistant

Lieux de tournage :

Budget : 20 millions €

Box Office France : 1 274 987 Entrées

Site officiel : http://www.leschevaliers-lefilm.com/config.htm

Récompenses :

Fiche du film complète (image, résumé, note de la production, avis) au format PDF à disposition sur demande par mail, voir page d'acceuil

| Note production | Acteurs | Scénario | Producteur | Site Officiel | Récompenses | Lieux | Budget

 Résumé :

Salon aéronautique de Farnborough, Angleterre. Alors qu'il était en pleine démonstration, un Mirage 2000 a disparu au-dessus de la Mer du Nord. Les capitaines Antoine Marchelli et Sébastien Vallois sont immédiatement envoyés en patrouille pour retrouver l'avion.

Ils ne tardent pas à apercevoir le 2000 : il vole dissimulé sous un 747 d'Air France. Le pilote du Mirage les a repérés, il s'est placé en position de combat. Marchelli et Vallois reçoivent l'ordre d'abandonner la poursuite sans délai. Trop tard ! Le 2000 est sur le point d'abattre Vallois. Marchelli va devoir l'éliminer pour protéger son équipier.

Cet incident est le prélude d'une gigantesque manipulation. A la clé, le détournement d'un avion de chasse français à des fins terroristes. Une manipulation dont le dernier acte se jouera un 14 juillet dans le ciel de Paris, au dessus des Champs-Elysées.

 Note de la production

Un défi inédit

Entretien avec les acteurs principaux du film Les Chevaliers du Ciel

Entretien avec l'équipe de production du film Les Chevaliers du Ciel

Entretien avec Gérard Pirès, réalisateur des Chevaliers du Ciel

Un défi inédit

Dans le contexte du cinéma français et européen, le film Les Chevaliers du Ciel (2004) apparaît comme un véritable défi, un défi inédit lancé par Gérard Pirès avant même l'écriture du scénario, et accepté d'emblée par la production : tenter de réaliser un film résolument moderne sans recourir aux effets spéciaux numériques et aux reconstitutions en 3-D, des prises de vue réelles capturant les scènes aériennes les plus spectaculaires jamais montrées au cinéma.

Spécialement conçu à cet effet, un bidon de kérosène a servi de support d'intégration pour quatre caméras 35mm montées sur Mirage 2000, et susceptibles de filmer simultanément jusqu'à 50 000 pieds d'altitude et à la vitesse du son ! Afin de recréer pour les comédiens les conditions de vol réelles en cockpit, un habitacle de Mirage 2000 a été entièrement reconstruit sur nacelle télescopique avec caméras intégrées.

Ce défi n'aurait pu être relevé sans le soutien exceptionnel du Ministère de la Défense et de l'Armée de l'Air française. Un soutien d'envergure : 12 semaines de tournage aérien dont, cas exceptionnel, plusieurs vols au-dessus du centre de Paris, participation à plusieurs dizaines de missions Mirage 2000 en compagnie des meilleurs pilotes de chasse des bases d'Orange et de Djibouti.

Cependant, au-delà de la technologie, c'est l'enthousiasme et la passion communes des pilotes, des techniciens, des officiers, auxquels il convient d'associer certains fleurons de l’industrie européenne, qui ont permis de relever ce fantastique défi.

Entretien avec les acteurs principaux du film Les Chevaliers du Ciel

Le casting est un point fort du film. Comment vous êtes-vous retrouvés tous ensemble sur le projet ?
Benoît Magimel
Les producteurs m'ont parlé du film alors qu'il n'était pas encore écrit puis j'ai rencontré Gérard. Je trouvais l'idée très séduisante. Le fait que Gérard soit un passionné d'aéronautique, qu'il pilote lui-même et qu'il ait énormément d'expérience vécue en ce domaine, me donnait le sentiment que cela allait être un film important pour lui, auquel il donnerait une dimension plus personnelle qu'aux précédents films de genre qu'il avait réalisés. Le choix de mes partenaires a aussi été décisif pour moi. Tout était réuni pour me donner envie.

Clovis Cornillac
Je me suis dit qu'il y avait peu de films de cet ordre-là en France. Et puis c'est ce type de films qui m'a fait aller au cinéma quand j'étais gamin, et qui m'a permis ensuite de découvrir des films plus pointus. Je suis assez gourmand de ces films d'action bien fichus, dont l'objectif fondamental est de divertir. Je ne ferai pas que cela dans ma vie et de toute façon, il n'y a pas beaucoup de rôles comme celui-là à tenir…

Géraldine Pailhas
Honnêtement, j'étais assez surprise que l'on puisse penser à moi… J'en étais très contente, d'autant que je savais déjà que Clovis et Benoît faisaient le film… Dès la première page du scénario, le rôle m'a tout de suite enchantée. À vrai dire, je suis assez friande de films d'action, plutôt américains, parce qu'a priori, les films d'action français sont plus rares ! Et quand cette opportunité de participer aux Chevaliers du Ciel m'a été offerte, j'ai pensé que je n'aurais pas deux fois une proposition comme celle-là. Tout ce qui constituait ce projet était source d'enthousiasme et de curiosité pour moi. Ensuite la rencontre avec Gérard Pirès a achevé de me convaincre !

Philippe Torreton
J'avais toujours rêvé de participer à un film d'action et d'aventures. J'avais beau le crier sur tous les toits et à longueur d'interviews, mais voilà, j'ai une réputation d'acteur intello qui fait du théâtre, alors qu'en fait, j'adore plein d'autres genres. J'étais donc déjà heureux que les producteurs et Gérard Pirès pensent à moi, et encore plus heureux que ce soit pour jouer un scénario comme celui-là, avec de l'action, mais aussi des images que l'on n'aura jamais vues auparavant. Les moyens qui ont été donnés à ce film sont au service d'une histoire qui nous concerne tous, dans le sens où elle véhicule pas mal de choses malheureusement propres au monde dans lequel on vit : la menace terroriste, les ventes d'armes, les compétitions entre pays pour obtenir certains marchés, etc. Je trouve que c'est assez intelligent d'avoir réussi à regrouper tout ça, sans que l'action ne l'emporte sur la dramaturgie et inversement. Je trouve que le cocktail est vraiment bien fait. Donc, j'avais toutes les raisons de dire oui.

Alice Taglioni
J'étais convaincue avant même de lire le scénario ! Il faut dire que j'ai été baignée dans ce milieu par mon grand frère. En effet, depuis qu'il a 4 ans, il est fou d'avions de chasse, notamment du Mirage 2000. C'était son rêve et il ne parlait que de ça. Il est vrai que, en voir un de près, monter dedans et même faire un vol en Alpha Jet comme on a pu le faire avec Clovis et Benoît, c'était un rêve inaccessible qui s'est réalisé. Pour tout dire, c'était génial… Et puis c'était un vrai film d'action et pas seulement un film de mecs avec des avions ! Il y avait de la place pour les rôles féminins et l'intrigue semblait palpitante.

Vous n'avez pas eu peur que les avions soient les vrais héros du film ?
Benoît Magimel

Non, pour moi, la consistance et l'étoffe des personnages constituent l'argument principal d'un film d'action réussi… Si vous n'êtes pas dans l'humain, à quoi bon prendre des acteurs ? Les machines n'ont pas de sentiments. Sans personnages, on finit par s'ennuyer, cela devient conceptuel. Les personnages ont été notre préoccupation principale pendant l'écriture et tout le monde s'est investi dedans. De toute façon, l'histoire est toujours l'enjeu numéro 1 et c'est grâce aux émotions que l'on fait le voyage.

Clovis Cornillac
Les avions ont certes un rôle prépondérant, mais cela ne m'a pas fait peur. Les avions font bien partie des personnages principaux du film, mais on sait bien que tout l'enjeu dépasse la simple description de ces avions. Si l'on veut juste voir des avions voler, autant regarder un beau documentaire sur l'aviation ou sur l'Armée de l'Air. En revanche, si l'on fait un film, il faut pouvoir identifier et incarner celui ou celle qui est dans l'avion. Et tout notre travail consiste en cela.

Géraldine Pailhas
Je ne m'étais pas posé la question. Ça me semblait évident et Gérard Pirès me l'a confirmé, ses acteurs ne seraient pas là juste pour faire joli même si nous ne sommes plutôt pas trop moches dans le film !

Alice Taglioni
Et j'ai même l'impression que la part des comédiens est énorme. Les avions, c'est exactement comme la combinaison de pilote : ça aide juste à rentrer dans son rôle. Dans le film, je suis très souvent en pilote et dès que je m'habille comme ça, j'ai presque l'impression d'y être ! Quand en plus, il y a le Mirage 2000 à côté… c'est une aide formidable. C'est plus dur quand il faut jouer vraiment et qu'il n'y a plus le support des avions.

Philippe Torreton
De toute façon, on ne voit jamais le personnage de Bertrand dans un avion de guerre ! S'il prend un avion, c'est un Falcon, pas un Mirage. Il n'est pas au cœur des forces vives comme Benoît ou Clovis. Il est plus dans l'aspect théorique, proche du commandement. Donc il a encore d'une certaine manière plus de “matière”, je trouve, par rapport à d'autres rôles, parce que c'est compliqué de jouer le mystère. Et mon personnage en déborde…

A propos des personnages, justement. Pourquoi Marchelli et Vallois, et non plus Tanguy et Laverdure ?
Clovis Cornillac

Je crois que Gérard n'était pas très chaud pour adapter les personnages de l'époque, le côté un peu Pompidou, un peu vieillot… Quant à moi, c'est simple : je ne connaissais la BD que par son titre. Donc pas d'attachement à Tanguy, au contraire… Depuis l'époque de « Tanguy et Laverdure », le métier de pilote a évolué, la technique a évolué, les enjeux et les menaces ont changé… Il semblait logique que Tanguy et Laverdure aient changé eux aussi.

Benoît Magimel
Ce qui nous a plu, c'est le tandem entre les deux pilotes. Marchelli me semble d'abord indissociable de Vallois. On a d'ailleurs essayé de construire ensemble leurs identités pour aboutir à une histoire d'amitié entre deux personnages très différents, mais très complémentaires.

Clovis Cornillac
Il y a ce que l'on pourrait appeler deux héros, enfin deux images de héros, qui sont donc Marchelli et Vallois. Moi, je fais Vallois et Marchelli, c'est Benoît. Il incarne un personnage qui est plus secret, une espèce de beau gars un peu dense et moi, je suis le type un peu laid et un peu grande gueule ! Honnêtement, je pense que Benoît et moi, en tant que couple, ce n’est pas une mauvaise idée en soi ! A l'image, nous sommes très différents dans notre manière de jouer par exemple, mais on reste très complémentaires. On a un rapport amical, franc et quand on a eu envie de changer des choses, ça s'est fait sans problème. Et en dehors du tournage, on s'aime bien, alors…

Quelles ont été vos impressions quand vous avez approché le milieu des pilotes et de l'armée ?
Benoît Magimel

On a bénéficié d'une longue préparation au cours de laquelle on a effectivement pu rencontrer beaucoup de pilotes, d'officiers… Franchement ils ont été impeccables ! Ils croyaient à fond au projet, nous ont beaucoup aidés, on n'a jamais eu l'impression d'être avec des militaires, en fait !

Clovis Cornillac
Tout à fait. Je ne suis pas quelqu'un de militariste, loin de là… Mais ce qui est frappant dans ce milieu, c'est la passion qui les réunit. Pilote de chasse, ce n'est pas n'importe quel métier. Ou plutôt, c'est un métier et une passion. Sur ce point, ce ne sont pas des métiers très différents des nôtres. Si l'on n'est pas mûs par quelque chose qui nous passionne, ce n'est vraiment pas la peine d'essayer. Le fait de voler m'a fait comprendre l'état de liberté hallucinant dans lequel pouvait se retrouver un pilote. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de tenir le manche pendant le vol. C'était merveilleux.

Benoît Magimel
La plupart du temps, ils ont ce désir de voler, de toucher le ciel depuis leur enfance. On ne devient pas pilote par hasard. On peut donc comprendre quelle tragédie traversent ceux qui se voient exclus de l'Armée de l'Air pour une faute qu'ils n'ont pas commise, ce qui arrive dans le film à nos personnages. Cela résonne comme une trahison et je trouvais important de bien le faire ressentir dans le film.

Philippe Torreton
C'est assez hallucinant de pénétrer dans ce milieu-là. Ce n'est pas tellement les avions eux-mêmes, ce sont plutôt les militaires qui nous autorisent à être là, dans les hangars, à voir des choses que normalement on n'a pas le droit de voir. C'est quand même incroyable de laisser pénétrer toute une équipe de cinéma dans un tel lieu. Ce qui est formidable dans le cinéma, notamment dans ce genre de film, c'est que parfois, il y a des portes qui s'ouvrent sur des mondes qu'on croit connaître, mais qu'on n'a jamais approchés. C'était impressionnant de parler avec ces hommes. On en a rencontrés de tous les grades, des jeunes novices qui rentrent à l'école à ceux qui ont déjà beaucoup d'heures de vol… Ce sont des types très sérieux, mais qui ont de l'humour aussi, qui ont ce besoin de décompresser qu'on peut voir dans le film d'ailleurs. C'est touchant de pénétrer cette intimité-là. C'est plus cela qui m'a impressionné que les avions, même s'il est vrai que ce sont des engins sidérants.

Géraldine Pailhas
Nous avons été tous merveilleusement accueillis, chacun des deux mondes désirant en savoir plus sur l'autre. Mais c'est d'abord la carte postale qui m'a emballée : l'uniforme, les Ray Ban, le soleil qui tape sur le tarmac, les mirages 2000…Tout cela était parfaitement photogénique.

Alice Taglioni
Le plus marquant est d'avoir pu effectuer, avec Benoît et Clovis, un vol réel… C'était incroyable. Je n'avais pas du tout d'appréhension, alors que je peux en avoir à bord d'avions « normaux ». Là, aucune peur, j'avais juste hâte qu'on parte, qu'on mette les pieds dans le cockpit et qu'on décolle. Même si, au bout de vingt minutes, quand on sait qu'il reste encore quarante minutes de vol, on a un peu l'estomac retourné. Et il y a les fameux G et le “voile noir”. On en prend plein la tête…

Clovis Cornillac
Initialement, je me suis dit qu'effectuer un vol tenait du privilège, voire du luxe. Mais très rapidement, je me suis rendu compte que ce n'était pas luxueux du tout ! En vol, j'ai eu ce qu'on appelle le “voile gris”, qui survient autour de 7G. On voit tout en noir et blanc. Il existe aussi le “voile noir” qui se manifeste par une perte de connaissance pendant dix secondes et puis d'un coup, on revient. J'ai évité ça, mais pas le “voile gris”. On se retrouve écrasé dans le siège, on voit tout en noir et blanc, et après… on a très mal ! Mais il y a pire ! Ce sont les G négatifs, qui correspondent à une manœuvre de l'avion, où le pilote pousse fortement sur le manche. Tout va vers l'avant, tout le corps semble vouloir sortir de lui-même par le haut. En gros, le cerveau pousse sur les yeux ! En fait, l'expérience a été formidable, parce que pour tourner tous les plans rapprochés, on a eu la chance de travailler dans un cockpit monté sur vérins qui pouvait bouger dans tous les sens, modifiant au passage les sensations physiques liées à ces efforts. Et le fait d'avoir fait un vol réel au préalable permettait au corps de se souvenir de ce qu'il avait subi, comme prendre des G, ce dont on n'a pas forcément l'habitude. Dès que le cockpit penchait d'un côté, mon corps se rappelait la sensation qu'on peut avoir en vol quand on prend 4, 5, ou 6 G… En moins violent, quand même !

Philippe Torreton
J'envie Clovis, Benoît et Alice ! J'aurais adoré vivre cette expérience au moins une fois dans ma vie ! Le simple fait de voir décoller ces avions me fascine, ce sont quand même des engins fabuleux, et je n'ai même pas approché un simulateur… C'est une sacrée frustration.

Comment s'est passé le travail avec Gérard Pirès ?
Benoît Magimel

On a tous été très sérieux pendant la préparation du film mais pendant le tournage, ça s'est passé dans l'humour et la détente. Gérard est très précis. C'est aussi quelqu'un de droit et simple dans les rapports avec les autres. Sinon, en général, il est à côté de la caméra, très attentif aux acteurs. J'ai beaucoup d'amitié pour lui.

Clovis Cornillac
Vous preniez aussi des G ! Non, je plaisante ! C'est un type avec qui je m'entends très bien. Avec ce film, il semblait dans son univers. L'aéronautique, c'est sa passion. Lui aussi, dès qu'il peut être en l'air avec son hélico, des avions, des machins… il n'hésite pas. On se dit qu'il est passionné ! Donc c'était vraiment agréable. Ça s'est très bien passé.

Géraldine Pailhas
Il a une vision très nette de ce qu'il veut. Les prises étaient en général assez brèves, et le montage était déjà quasiment fait dans sa tête. Ça nous laissait un peu l'impression de ne pas maîtriser ce que l'on faisait, mais Gérard n'était jamais loin pour nous rassurer. Il ne lâche rien, il est très précis, mais il est aussi très disponible pour travailler sur des modifications de dernière minute.

Alice Taglioni
Il était formidable Monsieur Pirès ! Je m'entendais très bien avec lui. Je trouve que c'est un très bon directeur d'acteurs, très ouvert. Il est impressionnant parce qu'il sait tout à fait ce qu'il veut, et qu'il a son film dans la tête. Et ça, c'est rassurant pour un comédien, surtout sur un film comme celui-là.

Que pensez-vous du fait qu'un film de cette ampleur puisse voir le jour en France ?
Philippe Torreton

La France n'est pas le dernier pays au monde ! Nous disposons tout de même de quelques atouts, alors autant financer des projets comme celui-ci. Attention cependant à le faire correctement. Un film, ce n'est pas un concept, c'est un tout, c'est une histoire, c'est une équipe artistique et technique. Ce sont ces raisons qui font du cinéma un art compliqué. Il faut penser à tout. L'une des caractéristiques de ce film consiste dans le fait que chacun doit pouvoir en prendre pour son grade : il faut que les ados puissent adhérer au film, mais il faut aussi que le public plus adulte puisse sortir de là en se disant que l'histoire lui a plu. Quand on voit les films français qui sortent sur une année, on constate qu'il y a plein de choses très différentes. Il n'y a pas beaucoup de pays au monde qui peuvent se vanter de ça. Cette diversité offre certes le pire et le meilleur, mais elle a déjà le mérite d'exister. Je trouve qu'on devrait profiter de cela pour mettre en présence des gens que rien a priori n'amenait à se croiser… un peu comme sur ce film, ce que je trouve très encourageant.

Géraldine Pailhas
Quand on a la chance d'avoir autant de moyens techniques et artistiques, il n'est pas permis de faire un travail médiocre. On y tenait beaucoup. Notre ambition était grande.

Clovis Cornillac
En plus, le film touche quelque chose de mythique… Personnellement, je n'ai jamais rêvé d'être pilote. Mais quand j'ai annoncé que j'allais faire Les Chevaliers du Ciel (2004) , nombre d'amis - âgés de 20 à 80 ans - me disaient : “c'est génial !” Je n'avais pas imaginé deux secondes que certaines personnes que je connaissais allaient fantasmer sur un projet pareil ! Et tout d'un coup, j'ai mesuré que ça pouvait faire partie d'un fantasme collectif…

Entretien avec l'équipe de production du film Les Chevaliers du Ciel

Comment s'est déroulée la genèse de l'aventure, depuis l'idée de départ jusqu'au tournage ?
Laurent Brochand

Le projet a pris naissance au cours de l'année 2002. J'avais en tête la BD qui a bercé mon enfance : « Tanguy et Laverdure » de Charlier et Uderzo, et qui fût adaptée en série télé sous le nom « Les chevaliers du ciel » dans les années 60, 70 puis fin 80. Un titre fabuleux, un tandem de héros emblématique, un univers mythique… Je me suis alors rapproché de Mandarin Films pour leur soumettre le projet d'une adaptation cinématographique…

Eric Altmeyer
Nous avions envie de refaire un film avec Gérard, après l'expérience de Riders (2001) dont le tournage au Canada nous avait laissé un goût d'inachevé. Nous cherchions l'idée… Pour un spécialiste de l'aéronautique aussi sincère que Gérard, la BD de Charlier et Uderzo offrait d'énormes possibilités… On s'est vite rendus compte qu'en évoquant « Tanguy et Laverdure », on faisait appel à des personnages qui sont presque dans le patrimoine. Et puis surtout, cela représentait une propriété artistique qui résonnait extrêmement favorablement aux oreilles de l'Armée de l'Air, partenaire sans lequel nous n’aurions pas pu faire ce film. Pourtant, si « Tanguy et Laverdure » nous amenait beaucoup de choses valables, nous avons très vite opté pour un film reposant sur une histoire contemporaine et des héros modernisés. Depuis les années 60, les menaces ont changé autant que les pilotes ont évolué, ainsi que les avions, la mécanique et la technique. Et très naturellement, on en est venu à considérer que les Tanguy et Laverdure d'aujourd'hui seraient Marchelli et Vallois, d'autres pilotes, d'autres noms, une autre histoire.

Laurent Brochand
Gérard avait déjà collaboré avec Gilles Malençon sur l'un de ses scénarios. A la lecture de ce dernier, il nous avait paru déjà extrêmement efficace et surtout structuré à l'américaine, ce qui est peu fréquent dans les scénarios français. Il avait donc une bonne culture de la construction narrative sur les films d'action et d'aventure. D'autre part, il s'avère que Gilles Malençon est un fan absolu des pilotes, il connaît très bien l'aviation et les contraintes scénaristiques liées à ce domaine. C'était un problème qui disparaissait d'un coup, car prendre la plume et décrire une scène de combat aérien quand on n'y connaît rien, c'est extrêmement difficile et éprouvant. Avec Gilles, ça devenait facile et c'était même un plaisir.

Eric Altmeyer
On touche là le gros parti pris sur lequel repose la production du film : être dans le vrai. C'est le choix, je dirais même l'intuition fondamentale de Gérard : filmer de vrais avions dans les situations les plus réalistes possible, au plus près des actions décrites dans le scénario. C'est d'ailleurs assez amusant de constater que nous avons beaucoup travaillé à se passer des images 3-D et de créations virtuelles qui faisaient figure du nec plus ultra technologique il y a cinq ans. Mais qui, à notre sens, dénaturent complètement les films d'action hollywoodiens aujourd'hui…

Laurent Brochand
C'est ce parti pris qui a rendu nécessaire une collaboration étroite avec l'Armée de l'Air en général, et en particulier avec notre conseiller spécialisé, le Commandant Stéphane Garnier…

Commandant Stéphane Garnier
C'est une implication qui s'est déroulée sur deux ans. Mon premier rôle a consisté à aider le scénariste du film, Gilles Malençon, à découvrir le monde de l'aviation de chasse. J'ai consacré beaucoup de temps à lui expliquer mon cursus et celui de mes camarades, je l'ai emmené dans les escadrons, il m'a accompagné lorsque j'effectuais certains vols… Il s'est mis dans un coin et s'est fait oublier. Il a pu ainsi observer les relations entre les gens, la façon dont les choses se passaient, etc. Ensuite, il a commencé à mettre en place ses idées et mon rôle a consisté à répondre à une quantité incroyable de questions : il fallait que je fasse en sorte que ce qui était écrit dans le scénario soit plausible. Et ça a duré un certain temps puisqu'il y a eu presque vingt versions du scénario !

Ensuite, il y a une deuxième étape très intense, cette fois avec le réalisateur Gérard Pirès et peu après, avec le responsable des prises de vues aériennes, Eric Magnan. A trois, nous avons étudié comment réaliser la partie aérienne de l'histoire, et procédé au découpage des scènes, en un nombre incalculable de plans, qu'il fallait pouvoir réintégrer en missions aériennes… Car le but du jeu était assez clairement établi : l'équipe du film avait la possibilité de pouvoir filmer les missions d'entraînement de pilotes, et non pas des pilotes en train de faire du cinéma ! Donc mon rôle a consisté à insérer ces plans par petits morceaux dans des missions d'entraînement classique. Ça a été un long travail de fourmi parce qu'il y avait six cents plans aériens...

Eric Magnan
… Quand le scénario disait : “un avion tournoie derrière un autre”, ça voulait à la fois tout et rien dire ! Il fallait imaginer ça en termes de prises de vues aériennes, mais aussi de gestion de risques. Donc il y a eu, d'une part, un travail artistique consistant à fixer précisément ce que voulait Gérard, et puis, d'autre part, un travail de faisabilité, visant à préparer absolument tous les plans. Je faisais des dessins en trois dimensions pour déterminer où étaient placés les avions, à la bonne échelle, où était le soleil, et je dessinais les angles de caméra. Tout ça doit être complètement préparé parce qu'on ne peut en aucun cas improviser avec des avions qui se déplacent à 1000 km/h. On a eu des scènes avec quinze avions en même temps… On faisait donc de très gros briefings et notre philosophie était de dire ce qu'on allait faire et de faire ce qu'on avait dit. On n'improvisait pas. Il y a eu un gros travail avec les pilotes, pour voir et affiner ce qu’il était possible de faire, ce qui nous a amenés à effectuer des vols assez incroyables.

Commandant Stéphane Garnier
Une fois que cet aspect des choses a été à peu près réglé, il a fallu répondre à la question : “On a maintenant une histoire, la mise en scène a créé un plan de travail, alors comment fait-on ?” Un énorme travail de logistique s'est mis en place avec l'équipe de régie et avec le directeur de production. Il fallait compacter les choses et réunir sur un même site le maximum d'éléments pour le film, sans que cela ne perturbe le fonctionnement des bases de l'Armée de l'Air. On a visité chacune de ces bases et ensuite certains sites ont été retenus afin d'y tourner telle ou telle scène. Il fallait parallèlement assurer le suivi avec le service de l'information et de relations publiques de l'Armée de l'Air, afin d'obtenir les autorisations nécessaires pour chacun des moyens qui étaient indispensables à la réalisation du film.

Eric Altmeyer
Il faut comprendre que s’il y a trois ans, les autorités de l'Armée de l'Air et le SIRPA AIR avaient réagi à notre projet en disant : “oui, bon euh… pff… on va vous laisser faire, après tout pourquoi pas”, on se serait heurtés à d'innombrables difficultés à la fois logistiques et techniques, mais aussi dans les rapports humains. Au contraire, on a eu affaire à des gens qui ont eu d'emblée envie de réaliser quelque chose d'unique et d'exceptionnel.

Le tournage commence en juillet 2004. Dans le ciel de Paris…
Laurent Brochand

Pour le défilé du 14 juillet. Avec dix caméras disséminées à travers la ville et la première utilisation effective du pod que nous avions fait fabriquer…

Eric Magnan
Car pour faire ce film, on avait en fait besoin de matériel qui n'existait pas. Il fallait pouvoir filmer les Mirage 2000 dans toutes les situations, à toutes les vitesses, à toutes les altitudes et il n'y avait aucun moyen existant dans le monde pour filmer comme ça. On a donc pris un bidon supplémentaire de 2000 litres qui se fixe sous l'aile d'un Mirage 2000 qu'on a fait modifier par Dassault Aviation, en collaboration avec l'Armée de l'Air, pour y intégrer cinq caméras. Ces cinq caméras étaient disposées selon des angles bien choisis. Elles étaient commandées de la place arrière du Mirage 2000 biplace, avec un boîtier de commande qui était relié par radio. Voilà comment on a pu obtenir un moyen d'effectuer des prises de vues complètement uniques.

Comment ça se passait dans les airs ?
Eric Magnan

Pour chaque scène de combat - et il y en a beaucoup dans le film - il fallait faire des figures de voltige qui impliquaient beaucoup d'éléments. Il fallait que les avions soient proches, que la scène raconte quelque chose, c'est-à-dire que le côté esthétique de l'affaire était très important aussi. On ne tournait pas n'importe où, à des heures particulières, avec ou sans nuages… Puis il fallait continuer à cadrer pendant que les avions évoluaient en voltige, et il y avait toute une dimension de sécurité dont on ne pouvait bien sûr pas se départir. On ne peut pas faire n'importe quoi lors de ce genre de manipulation. Pendant les briefings, on cherchait les points de jonction entre la sécurité et ce qu'on voulait faire pour avoir un rendu artistique optimum. Pendant le vol, j'étais assis à l'arrière, les yeux rivés sur le contrôle vidéo. Les pilotes ne voyaient pas ce que filmaient les caméras, donc je devais les guider. Lors d'une série de voltiges où les avions étaient en patrouille très serrée, je pouvais leur dire : “L'avion sort un peu du champ.” Bien sûr, je ne le disais pas ainsi. En vol, j'utilisais des mots très courts et qui avaient été briefés avant. C'était vraiment intense…

Commandant Stéphane Garnier
J'ai montré le résultat aux pilotes de l'escadron dans lequel je vole, et beaucoup se sont dit : “Ce sont des images truquées !” Car dans l'inconscient collectif, on a l'habitude de voir des images embarquées tournées caméra à l'épaule, procédé qui procure un certain nombre d'imperfections aux images. Là, l'image semble irréelle tant elle est stable et pure. Mais non, les images ne sont pas truquées…

Revenons sur terre. Comment s'est déroulé le casting du film ?
Eric Altmeyer

Le casting est le fruit d'un choix primordial. Gérard et nous voulions par-dessus tout qu'il puisse refléter l’idée que malgré les avions, la beauté des prises de vues aériennes et le côté spectaculaire du film, la priorité était de raconter une histoire, avec de vrais personnages. C'est-à-dire que tout le pari de cette production, depuis l'écriture du scénario jusqu'à la postproduction, c'était d'aller au-delà du simple film d'aventure ou du gros film d'action. Il fallait enrichir le sujet et la matière avec une identification forte aux personnages et la transmission d'une émotion, d'une crédibilité dans leur trajectoire personnelle. Gérard sentait bien que c'était, pour lui aussi, l'occasion de faire de ce film non seulement un film d'action, mais un grand film tout court.

Laurent Brochand
Il nous fallait créer un tandem de comédiens qui soit en cohérence avec l'image du titre que nous avions souhaité conserver, Les Chevaliers du Ciel (2004), un tandem qui véhicule un certain idéal de courage et de panache. Benoît Magimel s'est imposé immédiatement, et il s'est avéré très rapidement emballé par le sujet. En face de Benoît, qui représentait plutôt le beau gosse taciturne, il nous fallait trouver son pendant, un personnage plus “rock’n roll” doté d'un vrai sens de l'humour, un peu dans l'esprit de l'opposition Tony Curtis - Roger Moore dans la série Amicalement vôtre... (The Persuaders!) (1971) . C'est ainsi qu'est arrivé Clovis, avec qui Benoît avait très envie de tourner…

Eric Altmeyer
Alice Taglioni est pratiquement la première à avoir été castée sur le film. On l'avait découverte dans La Bande du drugstore (2001) et lui proposer le rôle était comme une évidence. On ne savait pas à l'époque qu'elle était en plus passionnée par les avions…

Laurent Brochand
Puis, avec Géraldine Pailhas, dans la peau d'une jeune diplômée de l'ENA au service du Premier Ministre, et Philippe Torreton dans celui du patron des Services secrets, on savait qu'on disposait de l'affiche pour le film d'action intelligent qu'on avait en tête… Restait à aménager pour eux, et notamment pour ceux qui interprétaient des pilotes, Benoît, Clovis et Alice, la préparation pour qu'ils deviennent des pilotes crédibles…

Commandant Stéphane Garnier
Un peu comme je l'avais fait avec le scénariste, j’ai emmené les comédiens principaux, notamment sur la base d'Orange, dans l'univers particulier qu'est un escadron de chasse. On a aussi passé beaucoup de temps ensemble de manière à ce que je puisse leur faire partager ma passion. Ils ont ensuite découvert l'aéronautique militaire par le biais de la simulation. Ils ont suivi une vraie instruction au simulateur, telle que la font les pilotes de chasse d’Orange, ce qui leur a permis de connaître un petit peu le Mirage 2000. Et surtout, l'Armée de l'Air leur a offert l'opportunité de faire un vol en Alpha Jet ! Ils ont découvert ce qu'est le quotidien d'un pilote, la préparation de sa mission, le briefing, l'exécution - donc le vol - et puis ensuite tout ce que l'on fait au retour d'une mission. Ils ont vraiment pu bénéficier du travail qu'on avait fait en amont. Tout ce qu'on avait vu au simulateur, ils l'ont vu, cette fois-ci, en vol. Et tout ce travail leur a servi dès le début du tournage, qui commençait par des scènes dans un cockpit monté sur un bras articulé… Pendant les prises, on avait une liaison radio et je faisais référence à des choses que l'on avait vues ensemble au simulateur. Je leur disais : “Rappelle-toi, ce que tu fais là, c'est ce que je t'ai montré dans telle phase, etc. Donc voilà ce que tu as à mimer.” Enfin, lorsque les scènes de comédie se sont tournées sur la base à Orange et à Djibouti, ils disposaient alors de suffisamment d'informations pour les aider à composer et jouer des attitudes ou des réactions vraisemblables. Ils ont eu l'occasion de passer beaucoup de temps avec les pilotes, notamment sur la base aérienne d’Orange, c'est aussi ce qui leur a permis de prendre à la volée les choses qui les intéressaient, et leur servaient pour mieux camper leur propre personnage…

Eric Altmeyer
Ce qui est très excitant sur ce genre de projet, c'est qu'on est obligé de faire des choix dans un domaine inconnu. On n'avait qu'une seule référence en matière de films d'avion et d'action qui était Top Gun (1986) . Depuis, plein d'autres films incorporent des scènes d'avion, dont certaines qui sont d'ailleurs très réussies, mais ce ne sont que des interventions ponctuelles. Donc le choix a été pris très tôt - que ce soit au niveau de l'histoire, mais aussi de la qualité des prises de vues aériennes - d'essayer de faire aussi bien, sinon mieux, mais en tout cas différent. On ne pouvait pas se permettre de reproduire un modèle préexistant pour simplement s'y comparer.

Entretien avec Gérard Pirès, réalisateur des Chevaliers du Ciel

Entre les avions et l'action, il y avait beaucoup de choses dans Les Chevaliers du Ciel (2004) qui ne pouvaient que vous plaire…
Il y avait deux choses qui m'intéressaient, c'était évidemment de traiter l'aviation en images, mais aussi d'avoir l'occasion de travailler avec des comédiens de qualité, et de faire un film où le jeu avait une importance capitale. Je les ai aussi impliqués au maximum, sur l'aspect physique par exemple, en les faisant voler dans les conditions des pilotes de chasse. Il y a un petit côté “challenge” avec Top Gun (1986) qui n'était pas pour me déplaire.

Entre tout ce travail de fond effectué avec les comédiens et la dimension spectaculaire du film, peut-on dire que Les Chevaliers du Ciel (2004) est un peu une synthèse entre vos premiers films, qui étaient des aventures avant tout humaines, et ceux, plus récents, où le suspense et l'action prédominent ?

Absolument. Ma plus grande satisfaction sur ce film a été cette relation avec les comédiens. J'ai eu des acteurs qui venaient d'horizons différents : Benoît Magimel qui est un comédien assez “intérieur”, à la nature réservée mais qui avait une vision très analytique de ce qu'il faisait ; Clovis Cornillac qui est un boulimique du tournage, il adore ça ! ; Géraldine Pailhas qu'on n'a pas l'habitude de voir dans ce genre de film et qui m'avait dit une chose qui m'a beaucoup touché la première fois que nous nous sommes rencontrés : “Mais pourquoi as-tu pensé à moi ?” Ce à quoi j'ai répondu : “Parce que tu es comédienne !” (rires) Idem pour Philippe Torreton, qui voulait depuis longtemps faire un film “entertainment” alors qu'on ne lui en avait jamais proposé… Enfin Alice Taglioni, que j'ai rencontrée quand elle était au théâtre. Le hasard a fait qu'elle avait beaucoup d'affinités avec le milieu de l'aéronautique : son frère est pilote d'hélicoptère. Alice, il faut l'abattre pour la faire descendre d'un avion !

Et à vous entendre, les natures profondes de Benoît Magimel et Clovis Cornillac semblaient coller tout à fait avec le tempérament des personnages qu'ils devaient incarner : l'un plus introverti et l'autre plus énergique…
Oui, c'est vrai, cela correspondait. Mais on ne peut dire ça qu'à posteriori. Ce ne sont pas des choses sur lesquelles on a pu se déterminer à l'avance, et bien que la mission d'un comédien soit la faculté d'interpréter, il est vrai qu'ils ont ici des personnages proches d'eux-mêmes. Cela s'est vérifié au fur et à mesure.

Vous avez souvent comparé le travail du pilote et celui du réalisateur, en affirmant que ces deux activités avaient en commun l'obligation de prendre rapidement des décisions dans des contextes difficiles. Est-ce que, avec Les Chevaliers du Ciel (2004) , vous avez eu la sensation d'avoir pris ces bonnes décisions ?
Je vais dire oui… Enfin on verra surtout ça à l'atterrissage, c'est-à-dire à la sortie du film… Il a surtout fallu que je prenne des décisions d'ordre technique, sur la façon de filmer les scènes aéronautiques. Il fallait que ce soit original et efficace. Parce que quelquefois, on est original, mais pas efficace. L'un n'est pas obligatoirement synonyme de l'autre.

A ce propos, est-ce que les premières images qu'Eric Magnan vous a rapportées du ciel vous ont bluffé immédiatement, ou a-t-il fallu leur donner quelques modifications ?
Les premières prises de vue étaient très encourageantes, c'est-à-dire pas à 100% de ce que j'espérais pour le film. Je trouvais qu'il y avait juste un peu de mou, que c'était encore un peu trop contemplatif, un peu loin et les pilotes un peu timides ! Cela s'est rapidement corrigé, même hyper corrigé. J'ai impliqué Eric dans le tournage parce que je ne pouvais pas tout faire, qu'il est extraordinairement compétent et a une vision très synthétique. Nous avons collaboré comme deux techniciens très proches peuvent le faire, et cela s'est très bien passé.
Il faut oser booster une équipe de pilotes de chasse !
Je pilote toutes sortes d'avions et hélicoptères, je “voyais” les plans dont j'avais besoin et, pour les obtenir, il est vrai qu'il fallait aller au charbon. Je leur ai rappelé une phrase du photographe Franck Capa : “Si la photo n'est pas bonne, c'est que tu n'es pas assez près.” Et on est parti là-dessus ! Je n'ai pas eu besoin de le répéter, ni à Eric, ni aux pilotes !

Vous n'enviez pas parfois Eric Magnan d'avoir passé autant d'heures dans un avion aussi mythique qu'un Mirage ?
En tout cas pas d'y avoir passé des heures et des heures, c'est très éprouvant ! Ça n'a pas été une partie de plaisir tous les jours pour lui, il était crevé. Mais j'ai déjà eu la chance d'avoir volé en chasseur. J'ai même volé en Russie sur un Sukhoi 27… C'est un appareil assez violent, donc je ne me suis pas senti frustré de ce côté-là !

Vous souvenez-vous des sensations que vous aviez alors ressenties ?
C'était du plaisir et de la concentration. Autrement dit, exactement ce que l’on ressent quand on réalise un film.

Et en terme de mise en scène, comment vous y prenez-vous pour transcrire ces sensations fortes ?
Simplement en tentant d'être le plus réaliste possible. Ce qui n'est pas si simple, en fait ! Mais c'est une chose dont j'ai été très demandeur pour les plans aériens comme pour les scènes au sol, avec les acteurs dans les cockpits sur vérins. Ils ont subi ce que subissaient les pilotes. Cette exigence est l'une des choses qui devrait d'ailleurs distinguer Les Chevaliers du Ciel (2004) des autres films qui ont été faits sur ce sujet. Il y a un degré de réalisme qui a rarement été poussé aussi loin. Certains plans aériens réalisés par Eric Magnan ont même été retravaillés en post-production pour accentuer la perception de ces sensations. Le problème est que ce qu'on ressent physiquement ne correspond pas forcément à ce que capte la caméra. On peut ainsi filmer deux avions à 800 km/h, mais avoir la sensation qu'ils sont arrêtés. Car si les deux volent à la même vitesse, ils sont à 0 km/h l'un par rapport à l'autre…

Avez-vous été amené parfois à devoir redonner du “bougé” aux images parfaitement stables obtenues avec le pod ?
C'est effectivement arrivé. Il nous a fallu parfois dégrader la qualité des images pour leur donner plus de réalisme !

Comment s'approprie-t-on un film sur lequel il y a tant d'intervenants ?
Ce n'est pas difficile. Quand on fait un film, on est un chef de chantier et on n'est pas censé savoir tout faire, comme la musique par exemple. L'intérêt du grand nombre d'intervenants est que cela génère d'autant plus d'inventivité, de compétition, de challenge. Il faut surtout susciter la passion chez tous les intervenants, de façon à ce qu'ils aillent aussi au-delà d'eux-mêmes.

La notion de dépassement des limites est effectivement constante dans ce film. Quelles sont celles que vous avez été personnellement amené à repousser ?
C'est une question que je ne me pose pas ! (rires). La concentration non-stop peut-être… Il y a beaucoup d'erreurs qui sont commises par défaut de concentration. Il suffit de perdre le fil une fraction de seconde et vous vous retrouvez à côté de la plaque. Oui, c'est ça la vraie limite : ne jamais rien lâcher. Et vis-à-vis de tout et tous !

Les comédiens ont également testé leurs limites. Ainsi Clovis Cornillac évoque-t-il volontiers une scène où il devait tenir lui-même les commandes d'un biplan le temps qu'un hélicoptère le filme en gros plan. Quel souvenir avez-vous de cet instant ?
J'en connaissais les risques. Il est toujours difficile de faire s'approcher deux objets qui volent, surtout quand l'un est un hélico. Il ne faut pas qu'ils se touchent… Et le pilote était tout à fait au courant du problème ! Mais quand on travaille avec des gens extrêmement compétents comme il l'était, il n'y avait pas de raisons que cela se passe mal.

Et avec le recul, y a-t-il une chose que vous auriez aimé faire différemment ?
On peut toujours tout mieux faire ! Chaque plan pourrait être meilleur. Mais je crois que c'est comme en sculpture ou en peinture, il faut savoir s'arrêter. On demeure toujours un peu frustré, mais pour moi, la réalisation d'un film est un mélange d'euphorie et de frustration. Et cela peut être fatigant parfois.


Et quel souvenir avez-vous gardé de votre collaboration avec l'Armée de l'Air ?
Ça a été une collaboration importante, mais je pense qu'avec ce projet, ils sont tout aussi bénéficiaires que nous. C'est une collaboration qui a déjà prouvé son efficacité avec Top Gun (1986) : à l'époque, l'armée américaine avait prêté toute une base aérienne pendant deux mois ! J'espère leur renvoyer l'ascenseur avec un film de grand spectacle apprécié par le public. Les gens sur le terrain comme le Commandant Stéphane Garnier, ont été passionnés par le projet. Tous les pilotes se sont donnés à fond, il y avait énormément d'enthousiasme. Et c'est cela qu'il faut retenir. On leur a demandé des choses qu'ils ne font pas d'habitude et ils ont tout donné.


La collaboration du Commandant Garnier s'est prolongée jusqu'à la post-production ?

Absolument. Je l'ai constamment impliqué dans le processus. Il y avait des problèmes d'instrumentation à résoudre : je tenais à ce que chaque information soit imparable, et il y a eu un travail énorme entre Stéphane Garnier et Eve Ramboz, qui s'occupait de tous les effets spéciaux. Toutes les indications qui apparaissent sur les écrans de vol sont authentiques et conformes à la réalité. Même pour des plans qui durent une demi-seconde ! Le spectateur ne s'en apercevra peut-être pas, sauf quand il fera, plus tard, des arrêts sur image sur son lecteur DVD.

Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
C'est un film issu d'une passion unique. Tout le monde s'est défoncé...

Quelle place tiendra ce film dans votre filmographie ?
Pour l'instant, je suis surtout satisfait de l'addition des défis techniques, et du plaisir que j'ai eu à travailler avec les comédiens. Le temps de la réflexion n'est pas encore là !