Brice de Nice
Réalisateur : James Huth

Genre : Comédie

Date : 06 avril 2005

Durée : 1 h 38

Origine : Français

Distribution : TFM Distribution

Résumé

Note de la production

Acteurs :

Jean Dujardin : Brice de Nice

Bruno Salomone : Igor D'hossegor

Clovis Cornillac : Marius

Elodie Bouchez : Jeanne

Alexandra Lamy : La sirène

François Chattot : Le père de Brice

Mathias Mlekuz : Eudes l'avocat

Antoine Duléry : Micky la légende

Directeur Photo : Philippe Piffeteau

Musique : Bruno Coulais

Costumes : Sandrine Weill

Chef Décorateur : Alain Veissier

Chef monteur :

Antoine Vareille

James Huth

Inégnieur du son : Jean Minondo

Mixage : William Flageollet

Scénario :

Jean Dujardin

Karine Angeli

James Huth

Producteur :

Eric Attmeyer

Nicolas Attmeyer

Production :

Mandarin Films

M6 Films

CinéCinemas

Canal+

 

Lieux de tournage :

Budget :

Site officiel : France : http://www.bricedenice.com/

Récompenses :

Fiche du film complète (image, résumé, note de la production, avis) au format PDF à disposition sur demande, voir page d'acceuil

 Résumé :

Eternel ado de presque 30 ans, délaissé par un père affairiste et une mère absente, Brice s'est réfugié dans une posture, un “style” avec lesquels il exprime son vrai vécu intrinsèque : Brice est surfeur, winner... Comme Bodhi, le héros de Point Break, son film culte, Brice attend donc de surfer SA vague... à Nice ! Personne pourtant ne se risque à se moquer de Brice : redoutable bretteur du langage, Brice s'est fait une spécialité de “casser” tout et tout le monde par le truchement de ses reparties verbales. Il fallait bien qu'un jour Brice soit rattrapé par la réalité...

Note de la production

Entetien avec Jean Dujardin

Entretien avec Clovis Cornillac

Entretien avec James Huth

Entretien avec Jean Dujardin :

Vous êtes-vous inspiré de quelqu’un en particulier pour créer ce personnage de Brice de Nice ?
En classe de Terminale, je connaissais un Brice qui était franchement ridicule. Son manque de recul m’amusait follement. Il passait son temps à casser les gens, et se prenait pour quelqu’un d’intelligent et de très spirituel. Ce gars-là, je l’ai archivé dans un coin de ma tête. A côté de ça, habitant à l’époque la région du Médoc, j’avais l’occasion de croiser des surfeurs. Je les observais et les écoutais beaucoup, du moins ceux qui préféraient jongler ou frimer au lieu d’aller à la baille. J’ai alors pensé qu’en connectant le Brice du lycée avec un surfeur, j’obtiendrais un personnage intéressant. Au niveau de son “staïle”, la perruque blonde s’est imposée tout de suite. Pareil pour l’espèce de fausse dent au cou et le tee-shirt bien jaune et bien moulant que j’ai acheté dans un magasin de fringues de filles. Un copain des beaux-arts a eu l’idée d’y inscrire le prénom avec la typo de Nike, ce qui faisait extrêmement prétentieux. Ainsi est donc né Brice de Nice, en 1995, qui est d’ailleurs très vite devenu le personnage phare de mes premiers spectacles.

Avouez, il y a un peu de vous dans Brice ?
Disons que c’est effectivement une exagération de moi. Mais Brice, je le vois surtout comme la représentation de tout ce que l’on aimerait être et ne pas être. On aimerait lui ressembler pour son art du bon mot. Qui n’a jamais enragé de ne pas trouver la bonne vanne au bon moment face à un tocard qui nous provoque ? C’est généralement deux heures plus tard, dans la voiture, qu’on se dit : “Ah mais oui, j’aurais dû lui répondre tel truc”. De plus, j’adore le côté solaire de Brice. Il incarne le bringueur qui est en moi. Il me fait du bien, parce qu’il se fout de tout, qu’il sourit et qu’il avance sans se poser de question. Alors bien sûr, il est aussi indélicat, égoïste et d’un narcissisme hallucinant, mais je le trouve malgré tout attachant, ce grand ado de trente ans.

Ce qui le sauve, c’est qu’il n’a finalement pas un mauvais fond…
Sans doute, oui. Il ne casse pas pour blesser, mais juste parce que ça le fait marrer. Si vous avez un poireau ou une tache de vin, il va les pointer du doigt et vous dire : “Tiens, c’est pas très beau ça”. Il n’agit pas par méchanceté, il a une réaction d’enfant. Il est comme eux, il s’étonne de tout.

D’ailleurs, les ados l’adorent ce personnage…
J’ai en effet été très surpris d’entendre des gamins de douze ans m’appeler Brice dans la rue alors que j’étais à cette époque surtout connu pour le Chouchou de ”Un gars, une fille” et que mes sketches ne passaient plus à la télé depuis très longtemps. Ils ont fait sa connaissance grâce au Net, où l’on peut télécharger quelques vidéos.

D’où vous est alors venue l’envie, des années plus tard, qu’il devienne le héros d’un film ?
Moi qui ne suis pas spécialement rivé au passé, reprendre à trente ans un personnage que j’avais joué à vingt-quatre m’a longtemps paru incongru. Cela dit, alors que la mode au cinéma est au trentenaire lambda rongé par les problèmes existentiels, j’avais envie de créer un rôle de composition, un type vraiment original et souriant. J’ai alors réuni mes divers sketchs et je suis allé voir ma copine Karine Angeli, qui écrivait pour “Un gars, une fille”. Avoir un point de vue féminin sur le sujet m’intéressait.

Vous aviez déjà une vague idée de l’histoire ?
Je savais juste qu’il s’agirait d’un mec seul sur une planche à Nice. Mais sur la Côte d’Azur, il n’y a pas de vague. Donc il attend. L’idée me semblait à la fois romantique et très absurde. J’ai dit à Karine : “Si tu trouves quelque chose, on continue le scénario. Dans le cas contraire, on arrête”. Elle m’appelle au bout de deux jours : “Ça y est, j’ai trouvé. D’où il vient, ce qu’il est, où il habite, qui il fréquente, quelles sont ses névroses. Approfondissons ces pistes”. Ensuite, on a bossé tous les deux. C’est venu assez vite, un peu comme les dominos. Mais le plus fou dans tout ça, c’est qu’une dizaine de jours plus tard, je reçois un coup de fil des producteurs Eric et Nicolas Altmayer. Et qu’est-ce qu’ils me disent ? Que le personnage de Brice les intéresse ! Je n’en revenais pas. On s’est rencontré, ils m’ont demandé un synopsis de trente pages et l’aventure pouvait enfin commencer.

Pourquoi Brice est-il devenu un gosse de riche ?
Son inaptitude au travail l’isolait encore davantage, et le fait que ses potes ne le côtoient que pour le fric de son père et non par amitié renforçait son côté touchant. C’était une jolie manière de l’épaissir, de remplir son sac à dos. Karine a aussi eu l’idée d’en faire un fan absolu de Point Break. Ça nous permettait de mixer des images du film de Kathryn Bigelow avec celles de Brice, ce qui nous plaisait bien, et de convertir Brice à la religion du “Bodhisme”.

Bien qu’il s’inspire d’un personnage de one man show, le film ne ressemble jamais à une simple enfilade de sketchs. Comment avez-vous réussi à éviter cet écueil ?
En le considérant justement non pas comme une figure de sketchs mais comme un héros de cinéma. C’est-à-dire en créant tout un univers et une vraie histoire. Durant les vingt ou trente premières minutes, le film présente le personnage. En ce sens, il donne aux aficionados ce qu’ils attendaient, avec des fêtes yellow et des vannes à gogo. Puis, assez vite, il a fallu entrer dans le vif du sujet. Pour que le film ne fasse pas du surplace, Brice devait impérativement quitter Nice. Quitter sa mer, ou de manière plus symbolique,sa mère. Il effectue un trajet initiatique en partant pour Biarritz. Durant cette partie, on a voulu conserver une bonne humeur ambiante, sans pour autant chercher la blague à tout prix.

Il y a d’ailleurs dans le film quelques belles plages de sable… mais aussi d’émotion...
J’y tenais beaucoup. Et aussi à ce qu’il véhicule certaines valeurs adolescentes : “Crois en tes rêves”, “Qu’est-ce que l’amitié”, “Deviens ce que tu es”… Avec James Huth, on voulait inclure une dimension de conte. Un peu entre Point Break et Shrek. Une sorte de Point Shrek quoi, un film fun et bigarré. Et je crois qu’on a réussi.

En parlant de James Huth, à quel moment est-il intervenu dans le processus du film ?
Au bout de six mois d’écriture. C’est mon premier scénario, et je dois reconnaître que ce n’était pas toujours évident. J’avais l’impression de me trouver à un immense carrefour et de ne pas savoir quelle route emprunter. James est alors arrivé à un moment où Karine et moi nous posions beaucoup de questions. Et d’une certaine façon, il nous a débloqués.

Qu’a-t-il apporté au film selon vous ?
Sa joie de vivre. Mais aussi l’âme du Brice 2005. Il nous a indiqué la direction à prendre, nous a poussé à assumer certaines de nos idées, comme les chansons. On en avait discuté avec Karine, mais on trouvait ça too much. Lui, nous a expliqué qu’au contraire, ce type de personnage autorise mille et une fantaisies. Pour la scène du casse par exemple, il était hors de question que Brice tienne un flingue avec un air menaçant. Il apparaît bien trop rayonnant et positif pour ça. On a du coup opté pour une séquence musicale. Quel bonheur de pouvoir jouer et danser en même temps. Je pense même que c’est la quintessence du métier de comédien.

Le côté comédie à la Blake Edwards et le clin d’oeil à La Party, c’est James Huth qui en est aussi à l’origine ?
Absolument. Il aime décaler ce qui est déjà décalé. Il va parfois très loin, mais il se goure rarement. Avec James, on a aussi voulu semer plein de petits gags très furtifs. Comme la scène où un petit vieux se plaint d’avoir mal au dos et Brice arrive pour s’asseoir et lui prend sa chaise : le petit vieux se casse alors la figure. On ne fera qu’entendre sa chute, mais on ne la verra pas. Je raffole de ce genre de gags.

Au niveau du jeu, avez-vous réussi facilement à enfiler les baskets de ce Brice que vous connaissez par coeur ?
Bizarrement, non. J’ai mûri depuis, mes diverses expériences m’ont fait évoluer, si bien qu’au début du tournage, j’ai eu parfois l’impression de partir en vrille. James me demandait d’y aller à fond, mais moi j’estimais que je devais me freiner. Mais il semblait si sûr de lui que j’ai fini par penser qu’il ne pouvait pas bluffer. Mes doutes ont alors disparu et on a commencé à se marrer comme des gamins. On “briçait” tout et je crois même qu’une partie de l’équipe ne comprenait pas grand-chose à nos délires.

Dans le film, vous dansez, vous nagez et vous bougez sans arrêt. Votre secret pour tenir ?
Avant le tournage, j’ai suivi une préparation physique avec un coach durant cinq mois, à raison de six heures par semaine. J’ai d’abord fait de l’assèchement, et j’ai ensuite travaillé les poids, en surveillant mon alimentation et en prenant un peu de protéines. Mais pas de créatines, je vous jure (rires). Je devais quand même m’étoffer un peu pour être crédible en Brice. L’entraînement m’a aussi permis de me sentir en pleine forme. Car mine de rien, il faut avoir la santé avec James : il lui arrivait souvent de recommencer quinze ou vingt fois les prises. Il aime bien gratter, aller chercher plus loin, pousser les comédiens à improviser…

Une méthode qui vous convient ?
A 100 %. Souvenez-vous de cette scène, quand Brice dit “Vous n’avez pas vu un petit chien, grand comme ça, haut comme ça, il courrait très vite” tout en exhibant ses muscles : c’est un gag que j’avais en tête depuis un bout de temps et que j’ai fait devant la caméra. James s’est marré et il a décidé de le garder. Une autre de ses particularités : il laisse toujours la caméra tourner après une prise. Ce moment de flottement assez étrange permet de tenter des choses. Par exemple, quand la grand-mère pleure dans mes bras, il n’était pas du tout prévu que je lui réponde d’un air dégoûté : “Pas sur mon tee-shirt s’il te plaît”.

Un mot sur les comédiens qui vous entourent…
Clovis Cornillac est d’une générosité inouïe dans le rôle de Marius. J’ai été très agréablement surpris qu’il accepte le rôle, car il vient d’un univers très différent. Pareil pour Elodie Bouchez, qui joue Jeanne. C’est James qui a pensé à elle, et il a eu raison. Concernant Alexandra Lamy, la sirène, et Bruno Salomone, le méchant, le pendant côte Ouest de Brice, le fait qu’ils fassent tous deux partie de l’aventure sonnait comme une évidence pour moi.

Que réservez-vous à Brice pour l’avenir ?
Je ne ferme rien. Brice, c’est de l’oxygène, un personnage haut en couleur et rare. Mais il est bien trop tôt pour dire s’il réapparaîtra au détour d’un sketch ou dans Kill Brice 2

 

Entretien avec Clovis Cornillac.

C’est la première fois que vous tournez dans ce type de comédie. Qu’est-ce qui a déclenché cette envie ?
Avant tout, j’aime surprendre. Les spectateurs, mais aussi moi-même. Je ne ferme rien et la possibilité de changer d’univers contribue à mon plaisir de comédien. Pour Brice de Nice, tout a commencé lors du “Printemps du cinéma”, dont Jean et moi étions les parrains. On ne se connaissait pas, mais le courant est tout de suite passé entre nous. On a bu quelques verres ensemble et je lui ai demandé quels étaient ses projets. Il m’a alors parlé de ce pseudo surfeur de Brice. L’idée m’a fait hurler rire et je lui ai dit : “Il te manque un personnage ? Ne cherche plus, tu l’as devant toi”. Jean s’est bien sûr montré extrêmement surpris. Pourtant, de mon côté, je savais, grâce à la manière dont s’est déroulée notre rencontre, que je faisais le bon choix. Le lendemain, la lecture du scénario n’a fait que confirmer mon instinct.

Qu’est-ce qui vous a séduit chez ce Brice ?
Son originalité. Je ne connais pas les sketches, mais Jean a donné vie à un type d’une incorrection qui me réjouit. Je le rapprocherais, même si leurs univers restent très différents, de certains personnages de Louis de Funès : ils ont une espèce de méchanceté en eux, mais ils sont tellement drôles qu’ils inspirent malgré tout la sympathie.

Concernant Marius, le colosse aux pieds d’argile que vous incarnez, avez-vous participé à sa création ?
Oui, Jean et James (Huth) m’ayant même donné carte blanche. Dans le scénario que j’ai eu entre les mains, Marius jouait déjà un rôle important, mais il n’avait pas de contours. Brice étant un blond aux cheveux longs, un gosse de riche longiligne qui se prend pour un mannequin et un type doué avec les mots, j’ai imaginé que son acolyte serait son double opposé. Soit un frisé aux épaules larges venant de la rue et surtout qui a du mal à s’exprimer. Au départ, je voulais même que Marius ne puisse jamais finir une phrase, que le spectateur ne comprenne strictement rien à ce qu’il raconte. Jean et James trouvaient le parti pris intéressant, mais excessif et trop risqué. On a donc fait un compromis qui me convient.

Marius est aussi un être extrêmement complexé, cachant un mystérieux secret…
Au début, il devait sentir très fort des pieds. Mais James a ensuite eu l’idée, quand même plus subtile, de son handicap physique assez particulier. La majorité des idées visuelles vient d’ailleurs de James, qui a vraiment su imposer son propre style au film.

Vous formez un joli couple avec Elodie Bouchez. Comment s’est passé votre collaboration ?
Très mal, car j’ai fini par découvrir que c’était un homme. Quel choc (rires). Non, je plaisante. C’était d’autant plus formidable que je n’avais jamais bossé avec elle et que je n’aurais jamais imaginé la rencontrer sur ce type de film. Pour moi, Brice de Nice est une comédie très drôle, il faut le préciser, car ce n’est pas toujours le cas dans les comédies aujourd’hui -, singulière et d’une incroyable modernité. Le film délivre aussi des messages sur la différence et l’amitié, mais il le fait avec swing et sans aucune prétention, ce que je trouve très rafraîchissant.

 

Entretien avec James Huth

Qu'est-ce qui vous plaisait dans le personnage de Brice de Nice ?
A l'image d'un Peter Sellers dans La Party, Jean a su créer un personnage qui n'appartient qu'à lui. Un personnage qui a la grâce. Son humour, sa vision quasi poétique du monde, sa démarche, sa gestuelle et sa manière de parler restent uniques. Au départ, Brice aurait tout pour être détestable : c'est un gosse de riche, il se regarde trois heures dans la glace tous les matins, il “casse” les autres toute la journée. Et pourtant, on s'attache à lui. Pourquoi ? Parce que Jean apporte son humanité, sa gentillesse au personnage. Brice n'est jamais délibérément méchant. Il dit juste ce qu'il pense au moment où il le pense. En fait, c'est ça. C'est un personnage unique, extrêmement sincère et qui a la grâce.

Le fait d'arriver dans le projet en cours d'écriture vous a-t-il posé des problèmes ?
Non, car Jean et sa co-scénariste Karine Angeli m'ont généreusement laissé entrer dans l'univers de Brice. Nous nous sommes tout de suite très bien entendus. Notre vision du “transfert” de Brice au cinéma était la même :
garder l'âme du personnage des sketches mais lui construire une vie, en faire un “vrai” être humain. Elever sur un piédestal ce super-héros de la casse, mais aussi développer ses fragilités pour mieux le comprendre et s'attacher à lui.

Quel était votre but : réaliser une comédie drôle, mais aussi esthétiquement recherchée ?
Chaque sujet impose ses codes esthétiques afin de traduire au mieux les émotions que l'on cherche à faire éprouver au spectateur. Tout l'univers cinématographique de Brice restait à créer. Un univers complet et cohérent qui serve le personnage, aide le spectateur à mieux le comprendre, afin qu'il puisse entrer dans le monde merveilleux de Brice. Brice est un personnage haut en couleurs, né dans le luxe. L'image devait donc être élégante, claquante. La lumière belle, mais ni fabriquée ni criarde, pour permettre au personnage d'être lui-même, excessif, sans tomber dans la caricature. En fait, une lumière plus anglo-saxonne que française. J'ai évité certaines couleurs trop fortes, comme le rouge, pour me concentrer sur d'autres plus en demiteintes, autour du jaune Brice. Son nouveau tee-shirt est d'ailleurs plus soft que l'original. Le jaune flashy initiall était parfait pour un sketch, mais trop saturé pour le Brice d'aujourd'hui. Il aurait fini par agresser l'oeil au bout d'une heure trente de film.

La bande-son de Bruno Coulais mélange divers styles, comme le funk, le rock ou la bossa. Pourquoi la musique tient-elle une place aussi importante dans votre film ?
La musique est un élément dramaturgique essentiel, je ne peux la dissocier de l'image lorsque je construis une scène. Il est vrai aussi que je suis fan des comédies musicales américaines de Busby Berkeley à aujourd'hui. Le travail de la musique est probablement le moment que je trouve le plus magique. La bande sonore, c'est pour moi cinquante pour cent d'un film… Mais encore une fois, c'est Brice qui impose ce choix. Son univers est extrêmement musical. Il a sa propre façon de bouger, de parler. Jean danse et bouge comme un Dieu. Il aurait été dommage de ne pas en profiter. Bruno Coulais est un magicien de l'impalpable. Il exprime, en le magnifiant, un univers que vous ne pouvez décrire. Quelle chance de pouvoir profiter de son talent ! Les séquences musicales se sont imposées d'elles-mêmes. Je trouve d'ailleurs que le chorégraphe, Jean-Claude Pambe Wayak, a réussi à bien mettre en valeur la formidable gestuelle de Jean.

Jean Dujardin incarne à trente-deux ans un personnage qu'il a créé à vingt-quatre ans. Sa maturité a-t-elle modifié, d'une manière ou d'une autre, l'image de Brice ?
Oui. Jean est aujourd'hui père de deux enfants, il est devenu un homme avec une sensualité affirmée. Une sensualité en totale contradiction avec son personnage de Brice resté bloqué à l'adolescence. Ce paradoxe renforce le charme et la complexité de Brice, lui donne plus d'épaisseur. Aujourd'hui, Brice est aussi un surfeur hyper sexy malgré lui.

Quel genre d'indications de jeu donniez-vous à Jean Dujardin ?
Brice est un personnage qui demande 300 pour cent d'investissement. Une énergie folle. C'est facile sur une journée, mais Jean était de tous les plans, tous les jours. Mon principal travail était de lui insuffler l'énergie que Brice nous prenait à tous les deux. On était “cassés” à la fin de chaque journée de tournage ! Le rôle de Brice demande une grande précision. Il doit être interprété avec autant d'extravagance que de justesse émotionnelle. C'est une performance d'acteur qui oblige à une très grande concentration et à un travail acharné.

Concernant les autres comédiens, pourquoi avoir choisi Clovis Cornillac et Elodie Bouchez qui viennent d'univers totalement opposés ?
Je n'avais qu'une préoccupation : prendre les acteurs les plus talentueux possible. Et j'ai eu beaucoup de chance. Le professionnalisme de Clovis me sidère. Il capte tout, tout de suite. Il a tout compris à la lecture du script. En trois minutes, il avait cerné le personnage de Marius, ses failles, sa complexité. Avec lui, toutes les prises sont bonnes. Et dès que vous dites "coupez", il prend soin de tous ceux qui l'entourent afin que le tournage se déroule dans la plus parfaite harmonie. Il est d'une immense gentillesse. C'est un acteur très doué. Elodie, quant à elle, n'a plus rien à prouver. J'ai toujours estimé que le cinéma sous exploitait son côté solaire. Pourtant, elle crève l'écran. C'est un personnage romantique, au sens plein du terme. Elle appartient aux contes de fées, à l'univers de Tim Burton. Elle a cette fragilité et cette magie-là. Elle m'a beaucoup inspiré.

Et Bruno Salomone ?
Bruno est une vraie rencontre. Un homme vraiment très drôle. C'est aussi un excellent comédien d'une grande sensibilité et qui n'a pas peur de tout donner. Il est aussi hyper sexy. J'aime son côté latin lover. Il a vraiment plusieurs facettes, une palette qui donne envie d'être exploitée. On n'a qu'une envie, c'est de tourner à nouveau avec lui. Un mot également sur Alexandra Lamy : je me souviens d'elle dans son costume de sirène, suspendue la tête à l'envers ou à cinq mètres sous l'eau avec sa mono palme et sa longue queue… toujours souriante. Et en plus, elle devait jouer la coquine ! J'espère un jour pouvoir la diriger dans un rôle plus important, à sa mesure. Un des secrets de ce film est d'avoir eu des acteurs aux qualités professionnelles et humaines hors pair.

Quel souvenir gardez-vous du tournage malgré les divers problèmes rencontrés ?
Comme je vous le disais, l'aventure humaine a été extraordinaire. Ça nous a permis de garder la pêche malgré tous les incidents : beaucoup d'intempéries et surtout un incendie criminel qui a détruit le décor du bar de la plage la veille du tournage. Je me rappellerai toujours la chef coiffeuse que j'ai croisée juste après l'incendie. J'avais le moral à zéro. Elle m'a dit avec un grand sourire : "Mais tu ne te rends pas compte, c'est merveilleux. Tous les grands films du cinéma ont été tournés dans le chaos et ont connu plein de catastrophes.". Des gens aussi positifs ne peuvent que vous filer une énergie incroyable.

Jean Dujardin décrit Brice de Nice comme un conte fun et bigarré. Et vous ?
Sa définition me convient parfaitement. C'est un film sur les différences, l'acceptation des siennes et de celles des autres. Le film est fun et bigarré, parce que passer une heure et demie avec Brice vous revigore, vous change les idées et vous charge en bonnes ondes. Quant à la notion de conte, c'est effectivement ce que nous cherchions à toucher du doigt. Cette forme de narration généreuse qui traite de thèmes simples et universels "Si tu risques l'amitié, tu trouveras l'amour". Ou encore "Il faut croire en ses rêves". Un thème qui me touche particulièrement car j'ai moi-même changé de vie, voilà déjà un bon bout de temps, pour suivre mon rêve : celui de réaliser des films.